Première fable de Jean de Lafontaine, éditée en mars 1668
La Cigale ayant chanté tout l’été
Se trouva fort dépourvue
Quand la bise fut venue.
Pas un seul petit morceau
De mouche ou de vermisseau.
Elle alla crier famine
Chez la Fourmi, sa voisine,
La priant de lui prêter
Quelques grains pour subsister
Jusqu’à la saison nouvelle.
Je vous paierai, lui dit-elle,
Avant l’août, foi d’animal,
Intérêt et principal.
La Fourmi n’est pas prêteuse,
C’est là son moindre défaut.
Que faisiez-vous au temps chaud?
Dit-elle à cette emprunteuse.
Nuit et jour à tout venant,
Je chantais ne vous en déplaise.
Vous chantiez? J’en suis fort aise,
Eh bien! Dansez maintenant
Je me permets ici d’ajouter une petite pincée de sel
Certes, c’est là une vieille fable, mais combien cette histoire est d’actualité?
À l’image de la cigale, nous aussi priorisons en ce moment les festivités.
Dans un monde idéal, il serait tout à fait ridicule de s’inquiéter
Mais voilà, notre planète est devenue trop sale pour continuer de chanter et danser.
Que faire et comment le dire?
Quand la Terre tremble et même transpire
Alors que partout les feux d’artifice pétaradent de joie
Et qu’on s’amuse bêtement à faire je ne sais quoi.
Nous, pauvres humains, qui distinguons à peine le bout de notre nez
Réveillons-nous avant qu’un glas funèbre annonce la fin de la récré.